L’Activity Based Working, ou travail basé sur l’activité, est un style de travail qui permet aux employés de choisir entre différents types d’environnements pour les faire correspondre avec leurs activités.

Ce principe d’organisation des espaces tire ses origines du début des années 1980, avec les recherches de l’architecte Américain Robert Luchetti.

En étudiant les espaces de travail, Robert Luchetti développe l’idée que chaque environnement de travail, avec ses attributs physiques et techniques particuliers, sert différentes activités quotidiennes.

Il a établit le principe de “modes de performances”, qui nécessitent chacun un environnement particulier.

En 1990, le consultant allemand Erik Veldhoen reprend cette idée et s’associe à la compagnie d’assurances Interpolis pour faire de ce concept une réalité. Il théorise l’Activity Based Working dans son livre La disparition du bureau (The Demise of The Office, 1994).

Depuis, les technologies ont envahi nos bureaux pour changer à jamais notre rapport au travail et à l’espace, et les modes d’activités prolifèrent, toutes aussi différentes les unes des autres.La théorisation de ces activités et du type d’environnement idéal pour chacune d’entre elles prend des ampleurs considérables, qu’il devient difficile de suivre.

Pourtant l’Activity Based Working, reste un modèle visionnaire d’organisation des espaces de travail, dans le sens où ses concepts et principes s’appliquent de façon intemporelle, et s’adapte à l’évolution constante du marché du travail.

Et il existe des processus et des moyens simples pour appliquer ses principes, et aider à fabriquer un environnement de travail sain et fertile en idées.

‍

L’ABW : pourquoi ?

Il paraît évident qu’offrir aux travailleurs un choix d’espaces leur permettra de s’épanouir à différents moments de leurs projets.

Les organisations voient la satisfaction de leurs employés vis-à-vis du lieu de travail augmenter de 17% en moyenne selon une étude sur le travail basé sur l’activité.

La production individuelle en serait accrue de 13% selon cette même étude.

L’Activity Based Working

Pour l’entreprise :

Réduction des coûts d’occupation,
réduction de l’empreinte environnementale
accroissement de la flexibilité
multiplication des interactions entre équipes, et donc du partage d’information
améliore l’efficacité des employés, aide au changement culturel

Pour l’employé :

liberté du choix du lieu de travail,
variété des types de postes
mobilité grâce aux outils technologiques
amélioration des interactions,
atténuation des distances hiérarchiques
mode de travail moins sédentaire et plus sain
postes de travail moins nombreux et mieux conçus

Le travail n’est plus coincé entre les quatre murs du bureau. D’ailleurs, pour les travailleurs du tertiaire, il n’est plus limité ni dans sa forme et ni dans son mode d’exécution.

Il se manifeste en un mode de vie généralisé, et fait intervenir l’environnement direct et indirect du bâtiment.

‍

Les 3 éléments essentiels de l’ABW sont :

- La diversité des postes et modes de travail

- Le partage des postes (c’est la fin des postes attitrés )

- Le mode de travail (travailler de façon mobile et flexible en laissant décider quand et où).

Le principe se déploie sous forme d’une variété de lieux individuels et collectifs de travail, et sa méthodologie se fait en 3 temps.

‍

Le nouvel espace de travail en 3 temps

‍

La Conception

‍

La phase de conception est le moment où une diversité d’acteurs se regroupe pour répondre au besoin d’un utilisateur. Elle prend place dans un contexte précis qui l’influencera fortement.

Le projet identifié et valide avant tout un besoin : une nouvelle activité, rachat(s) ou évolution(s) organisationnelles, une volonté politique ou encore des opportunités ou des contraintes (comme une fin de bail).

Les études préparatoires (de faisabilité ou d’opportunité) permettent de mener à une décision fondatrice, et feront l’objet d’un prochain article.

Elles auditent les immeubles ou locaux cibles, le planning, la surface cible, le budget…

C’est le moment où le projet d’aménagement intérieur est établit. On formule une réponse au besoin utilisateur et on valide les différentes phases et budgets associés.

La gestion du projet et le pilotage

‍

La gestion du projet demande de développer les relations entre les 3 strates de responsabilités :

Le maître d’œuvre : l’architecte ou l’ingénieur qui mène le pilotage et la conception.

Les compagnons, ou ouvriers : les maçons, charpentiers, couvreurs qui réalisent les opérations …

Le maître d’ouvrage : le financeur ou le client.

Il faut payer les travaux au juste prix si on veut voir les voir achevés de bonne manière, et permettre que les interactions et échanges entre ces strates se fassent sans encombre.

L’usage

‍

Le lieu de travail a un multitude d’effets sur le corps, l’état d’esprit, les relations sociales et l’identité professionnelle.

L’espace n’est pas neutre il est “porteur des intentions managériales”. Il est le reflet de la structure hiérarchique, de l’identité au travail, de la culture d’entreprise.

La prédiction de l’usage et de la perception peut donc s’avérer difficile. Pour s’aider, il est important d’inscrire le projet d’aménagement dans la durée, et cela implique une longue phase de réflexion préalable.

En réponse aux problématiques des collaborateurs qu’on aura identifiés dans l’analyse préparatoire, on peut faire intervenir la médecine, l’ergonomie, la géographie sociale, la psychologie, pour permettre aux utilisateurs de s’approprier l’espace.

‍

Analyse préparatoire : Connaître ses utilisateurs

‍

Il faut d'abord cibler les attentes de collaborateurs et des équipes pour définir le type d’espace dont une organisation a besoin.

Si la liberté de ce mode de fonctionnement s’adresse principalement à ce que Peter Drucker nomme “les travailleurs du savoir”*, nos équipes techniques et de production vont aussi trouver dans ce projet de transformation leur part d'influence.

L’importance de la collaboration, de l’exploration, de l’autonomie et de l’initiative s’applique à toutes les strates de l’entreprise par le biais de principes basés sur l’échange, la communication et le partage d’informations.

Pour permettre à tous les employés d’atteindre les niveaux de performance promis par ce modèle d’organisation, il faut pouvoir adresser leurs besoins.

A cet effet, il sera nécessaire d’effectuer des sondages et interviews individuels pour connaître leurs besoins.

Quelles sont leurs principales caractéristiques ? De quoi ont-ils besoin ? Comment vont-ils s’adapter ?

Dès lors, le travail basé sur l’activité ne peut plus être encadré de la même façon que le scénario typique de commandement et de contrôle des organisation traditionnelles.

C’est donc toute l’organisation managériale et directive qui devra être reconduite si elle ne correspond pas à ces impératifs.

‍

*Qui appliquent des connaissances théoriques et analytiques.³

‍

Processus

‍

En tant que changement organisationnel, l’Activity Based Working demande un pilotage organisé, et à chaque étape du projet les utilisateurs sont d’une manière ou d’une autres impliqués.

‍

Imaginer

Avant d’établir son projet, il faudra s’inspirer d’autres réalisations et s’enquérir de l’avis d’un expert. Il peut être intéressant de récolter les idées des différentes parties prenante, en organisant des sondages et des brainstormings avec les différents départements.

Ensuite, il faudra analyser les processus de l’entreprise et la manière dont ses espaces sont utilisés.

Définir

À ce moment du projet, il faut établir de façon plus détaillée les différents besoins fonctionnels de l’espace en terme de taille et de typologie (brief fonctionnel). On pourra faire intervenir les employés en les faisant participer à des ateliers par exemple. Ensuite, les changements à réaliser en terme d’équipement et d’infrastructure pourront être notifiés dans un brief technique. C’est là que le budget détaillé et le planning devront être établis. Il pourra être judicieux de prévoir des présentations pour communiquer aux équipes le projet.

Concevoir

C’est au tour des FM et SI d’apporter leur contribution. Ils pourront élaborer un APS avec la définition des principes d’organisation et un APD (plan d’étage détaillé, solutions techniques). C’est peut être la partie la plus chronophage du projet, où il faudra prévoir des ateliers d’analyse, de critique et d’évaluation des propositions. Tous les plans, diagrammes, images de synthèses produits pourront ensuite servir à la communication aux utilisateurs.

Réaliser

Lors de la mise en œuvre du projet, il est temps de préparer les utilisateurs à leur prochain emménagement.

Les départements Immobilier et FM se familiarisent avec les nouveaux systèmes qui sont testés avant leur mise en service, et ils mettront en place les manuels d’entretien et de maintenance. Pour préparer le collaborateur à s’approprier ses nouveaux espaces, on pourra lui présenter des maquettes, organiser des visites de chantier, leur fournir des informations essentielles à leur installation. On prévoiera à cet effet un guide pratique des nouveaux espaces et un planning de déménagement et pour le premier jour.

S’installer

C’est une phase riche en émotions et en informations. Le moment où les managers devront être réactifs : il leur faudra récolter les feedbacks sur les problématiques d’usages dès qu’elles interviennent. Il faudra établir un protocole de signalement, de résolution et de prévention des problèmes matériels, créer une adresse unique pour les suggestions et réclamations, et réaliser une enquête de satisfaction. A l’issue de cette période, le concept sera évalué (satisfaction des utilisateurs, évaluation des fonctionnalités et de leurs usages…) et révisé.

Exploiter

L’ Activity Based Working, c’est proposer un mode de vie différent de ce qu’auront pu connaître vos utilisateurs.

Ce mode de vie implique de nouveaux principes et modes de fonctionnement, et ne marcherait pas sans l’accord général et le respect de ces principes.

Il faut maintenir la communication, et régulièrement rappeler les modalités des usages des espaces afin d’installer durablement de bonnes habitudes chez les collaborateurs.

Pour rester pertinent dans cette démarche, on s’aidera de rapports périodiques sur les taux d’occupation et de satisfaction. On s’assurera que les services s’organisent au niveau de la restauration, de la sécurité, du nettoyage en récoltant les données sur les fluctuations d’effectifs et d’usage.

A l’image d’un concept hôtelier, avec ces types d’espace à la demande, l’accueil de l’usager commencera avant son installation.

Il est, à chaque étape du projet, au centre des évolutions et des décisions qui mèneront au produit final que sera votre espace de bureau.

L’hospitalité ne s’arrête pas non plus une fois l’habitant installé. Par le biais d’une communication constante, et de la récolte d’informations, de sondages, les end-users pourront ensuite tirer parti des fonctionnalités qu’on mettra à sa disposition, et seront mieux disposés à exploiter toutes les ressources que ces nouveaux espaces impliquent.

‍

⭐ Un service à la carte.

‍

Pour que les collaborateurs reviennent au bureau, il faut pouvoir les fidéliser.

Rester plus de 8 heures par jour dans un même bâtiment demande du collaborateur d’être suffisamment stoïque et patient pour supporter d’être assis tout ce temps derrière un bureau.

Mais le niveau d’attention des générations les plus récentes ne leur permet pas de rester fidèles à une entreprise qui ne modernise pas son approche. Face à la concurrence, ces dernières choisiront d’avoir accès à une diversité d’espaces qui correspond mieux au flux changeant de leur état d’esprit, de leur niveau de concentration ou de leurs activités quotidiennes.

‍

Les jeunes et moins jeunes talents ont tour à tour besoin d’espaces conviviaux, chaleureux, propices aux itérations, pour leurs périodes de créativité et d’échange, ou au contraire d’un environnement isolé, intimiste ou tamisé pour leurs moments de concentration et de détente.

Ces espaces peuvent être catégorisés en 3 grandes typologies :

- Les espaces de travail qui nécessitent un plan de travail et/ou un ordinateur,

- Les espaces collaboratifs qui nécessitent d’autoriser les interactions,

- Et les espaces annexes pour les activités de soutien (reprographie, café, restauration…).

‍

Ces typologies se déclinent en plusieurs formes d’espaces :

Les postes individuels et focus room : espace de travail traditionnel, modules de concentration, cabines individuelles…
Les espaces communs et les zones publiques : pour se restaurer, partager…
Les zones par secteur, ou quartier : pour des petits groupes de travailleurs qui doivent se côtoyer sur des périodes plus longues et réalisent des tâches similaires ;
L’espace type laboratoire : établis, ateliers, pour les projets collaboratifs, ponctuels, et limités dans le temps
Les espaces dédiés à l’information : Bibliothèques, matériauthèques, médiathèques…
Les lieux d’isolement : alcôves
Les espaces de bien-être

Un parcours spatial amélioré grâce au zoning.

‍

La digitalisation permet aux travailleurs tertiaires, notamment ceux que l’on peut appeler les « travailleurs du savoir », de travailler ATAWADAC (pour rappel : AnyTime, AnyWhere, Any Device, Any Content). ²

Le travailleur digitalisé devient un travailleur augmenté. Son espace de travail se déploie donc dans un environnement extensif, direct et indirect.

S’il peut travailler de n’importe où, il doit pouvoir identifier visuellement et géographique les différentes zones qui sont attribuées à tel ou tel type d’activité.

Pour éviter que ces combinaisons d’espaces ne deviennent disparates et confuses, il faut pouvoir faciliter leur agencement et la communication d’un espace à l’autre.

C’est ici qu’intervient la méthode du zoning.

C’est ce qui permet d’agencer de façon organiser ces typologies d’espaces, de les rassembler par zones, de les diviser avec des espaces tampons qui n’empièteront pas sur le trajet, les itinéraires, l’accessibilité etc.

Pour effectuer un zoning organisationnel, il faut déterminer si les équipes ou services doivent avoir une place fixe dans le bâtiment ou non. Il différenciera les espaces en libre accès qui propose un environnement très flexible, mais à risque pour la collaboration (les membres de l’organisation sont dispersés dans le bâtiment), des aires d’équipes (où un point fixe regroupe les zones de rangements des équipes), et des territoires (un plateau ou une partie de plateau est attribué à une équipe de façon non-exclusive).

Le zoning par activité consiste à regrouper les activités au profil similaire, en les sectionnant par des zones de socialisation, vivantes et animées, par des zones d’intéraction qui reçoivent les activités de groupe et de collaboration (et qui servent également de zones tampon), et par des zones calmes qui permettent le travail solitaire en toute tranquilité.

Le zoning de sécurité permet de renforcer le niveau de sécurité et de confidentialité des zones de travail à mesure du parcours collaborateur.

Ce zoning permet d’accueillir les usagers par le biais de zones publiques, accessibles aux visiteurs, qui contiennent généralement l’espace d’accueil et un espace de détente. Il sera suivi par une zone semi-publique (personnel et visiteurs munis d’un badge), et qui contiendra souvent les salles de conférences, de réception, les restaurants d’entreprise etc. Plus en retrait de l’accueil se situera ensuite la zone opérationnelle (espace standard de travail), protégé par des systèmes de contrôles.

En fin de parcours, on installera les zones de sécurité ou de haute sécurité qui ne sont accessibles aux employés en charge de projets confidentiels, ou travaillant sur des données sensibles.

En bref

L’ Activity Based Working demande un travail de préparation et de réflexion intense. Il permet d’organiser l’espace selon des principes pérennes, car il fait intervenir différentes typologies et les organise selon un parcours adapté aux activités de l’organisation.

Il laisse suffisamment de leste pour permettre la réorganisation partielle et temporaires de certaines zones ou plateaux, tout en autorisant des parcours instinctifs et une communication idéale entre les différentes zones.

Comme chaque méthode d’organisation, elle nécessite assez de souplesse pour être réadapter tout au long de sa conception et de sa mise en oeuvre.

Pour se préparer aux écueils et aux difficultés il faut donc :

→ S’attendre à des résistances : informer, écouter et rassurer les utilisateurs

→ Laisser le temps suivre son cours. A l’image de Spotify, qui a mis 18 mois pour finaliser son Work Anywhere Program, le processus de changement se prépare. Au moins un an doit s’écouler entre le moment où le programme est conçu et le déménagement.

→ Adopter une approche pluridisciplinaire. Les services RH, SI, FM et communication fonctionnent le mieux en synergie. En engageant différentes parties prenantes on permet aux équipes de collaborer, de consulter les documents réalisés et de commenter les stratégies, et ce tout au long du projet.

→ Autoriser la critique.

→ Soigner son middle-management.

Quelques facteurs de réussite :

Donnez le choix : proposez une variété d'espaces offrant des tailles, des intimités et des ambiances différentes.
Ne pas compromettre la qualité : réduire le nombre de postes de travail, mettre l'accent sur l'ergonomie, le climat, l'esthétique et les fonctionnalités.
Préférez les espaces de concentration : salles de travail ou bibliothèques.
Soigner la qualité sonore : établir clairement un ensemble de spécifications pour les performances acoustiques.
Pour être plus facilement accessible, il est conseillé d'éviter les grands plateaux et de les diviser en sections de 10 à 16 personnes.
S’inspirer du résidentiel : tapis, revêtements et plantes vertes… Le mélange de différents types de mobiliers, comme le préconise Bluedigo dans cet autre article, peut par exemple contribuer à créer un style unique et original.
Fournir du matériel technologique fiable : il vaudra mieux mettre l’accent sur la qualité d’un équipement plutôt que sur sa nouveauté. La technologie, tout comme le design, n’est pas censée être un gadget. L’important étant qu’elle soit facilement adoptée par les utilisateurs, en diminuant leurs frictions. Un accès omniprésent à l'électricité et à la technologie peut s’effectuer sans avoir à multiplier les prises, câbles, et installations électriques en employant des technologies qui nous en libèrent, telles que celles développées par Osol. On privilégiera donc des équipements légers et puissants, des réseaux fiables et des outils intuitifs.
Nettoyer régulièrement : c'est important pour l'hygiène et la prévention. Vous pouvez faire appel à des spécialistes comme MerciYanis, qui facilitent les processus avec la propreté à l’usage.

‍

💬 On en parle

https://www.veldhoencompany.com/measuring-the-impact-of-activity-based-working
“Espaces de travail : nouveaux usages et nouveaux enjeux”, Delphine Minchella, Dunot, 2021
The Landmarks of tomorrow, Peter Drucker, 1959
Guide pratique de l’Activity Based Working, Juriaan Van Meel, Brief, éditions Charles Foster, 2021
The Great Good Place, Ray Oldenburg, 1989
Bluedigo
Ubiq
MerciYanis

‍

May 31, 2023

aménagement

stratégie

#workplace

#transformation

Culture Hybride

Introduction à l'Activity Based Working